Barbara Pompili ose le rapport de force avec la majorité

Mar 8, 2021 | Médias

Tristan Quinault-Maupoil (c) Copyright 2021 Le Figaro.

DEVANT l’objectif du photographe du Figaro , la petite troupe avance fièrement. Sur l’esplanade des Invalides, les plus fidèles de Barbara Pompili se pressent autour de la numéro trois du gouvernement. Dont Hugues Renson, le vice-président de l’Assemblée nationale, et le député Jacques Maire avec lesquels elle a fondé En Commun en mai dernier. Une association devenue parti politique à l’automne, au grand dam de La République en marche qui s’interroge sur les intentions de ses fondateurs. « Nous ne sommes pas une voix dissonante mais, oui, nous portons une musique à part dans la majorité. Nous avons une sensibilité et nous n’avons pas demandé la permission pour la faire entendre », proclame Hugues Renson, qui estime que « sur la solidarité, le social, l’écologie et l’humanisme, la majorité doit pouvoir faire plus et mieux ».

Les 36 parlementaires qui revendiquent leur appartenance à En Commun – contre 46 au lancement de la structure – auront l’occasion de marteler ce message dès lundi. Le projet de loi climat, présenté par Barbara Pompili, commence son examen en commission spéciale de l’Assemblée nationale. La ministre de la Transition écologique a indiqué en amont qu’elle « n’acceptera aucune baisse d’ambition » lors du débat parlementaire.

Face à certaines voix de la majorité qui voudraient revoir les contours du texte, eux promettent de faire barrage. « On ne veut pas de recul. On fera bloc. On soutiendra notre ministre », promet la députée du

Val-d’Oise Cécile Rilhac, qui vient d’être nommée porte-parole d’En Commun. « On défendra en séance ce texte auquel on croit et Barbara Pompili dans ses combats et ses positions. Car on l’a compris, sur ce sujet de l’écologie il y a encore un vrai travail de conviction à faire en interne », appuie Hugues Renson. Ainsi Barbara Pompili cherche à ne pas répéter l’erreur de Nicolas Hulot, qui avait fait le choix de ne pas s’entourer d’une équipe commando lorsqu’il était ministre de l’Écologie.

En Commun ne s’arrête pas au seul périmètre de la défense de l’environnement. Quand l’exécutif a mis en cause l’Observatoire de la laïcité, dans la foulée de l’assassinat de Samuel Paty, le parti a décidé d’en prendre la défense. Ce qui a d’ailleurs provoqué les départs des députés Anne-Christine Lang et Francis Chouat.

Le mois dernier En Commun s’est encore démarqué en demandant la sortie de l’état d’urgence. Surtout, le parti de 500 adhérents (payants) s’en prend régulièrement à Gérald Darmanin, accusé de trop tirer la majorité vers la droite. Sur l’interdiction de la distribution de repas aux migrants de Calais ou sur son soutien à Nicolas Sarkozy après sa récente condamnation, ils n’hésitent jamais à critiquer publiquement le ministre de l’Intérieur. « Il embarque avec lui le barycentre de la majorité. Ce que je reproche, c’est l’absence d’autres voix. La sienne est seule à s’exprimer, c’est donc problématique », tranche le député des Hauts-de-Seine, Jacques Maire. Qui enfonce le clou : « Si la majorité, c’est Darmanin, alors cela veut dire que nous sommes en compétition avec Marine Le Pen sur le même champ sémantique . » En conséquence, Maire craint qu’en 2022 la majorité « ne coalisera pas avec tous ceux qui ne s’y reconnaissent pas ». Autrement dit, la gauche ne viendra plus au secours des Marcheurs dans l’hypothèse d’un second tour face au RN ( Lire pages 4 et 5

).

Mise en garde

Le rapport de force assumé d’En Commun agace au sommet de la majorité. Il y a d’abord cette interview au Monde de Barbara Pompili, l’été dernier, où elle a entretenu le suspense sur son soutien à Emmanuel Macron en 2022. Quand En Commun a décidé de se transformer en parti politique, LREM a aussitôt fait savoir que « si chacun est libre de faire ses choix partisans, il doit en assumer les conséquences politiques, notamment dans la perspective des futures investitures aux élections locales et nationales ». Une sévère mise en garde qui a effrayé quelques élus.

La semaine dernière, Barbara Pompili et Hugues Renson ont rencontré Stanislas Guerini, le délégué général de LREM. La discussion fut franche même si chacun a promis de faire un pas vers l’autre. Le mouvement présidentiel relève avec soulagement que les députés affiliés à En Commun ont fait le choix en début d’année de se rattacher financièrement à LREM. Contrairement à d’anciens marcheurs qui ont rompu cet engagement.

Pour autant, En Commun peine à être reconnu comme un parti à part entière de la future maison commune promise par le premier ministre. Ce qui pose la question de la représentation du petit parti sur les listes des régionales. « Cette rencontre, c’est la reconnaissance de notre existence, une normalisation bienvenue et une institutionnalisation de nos relations », se contente de relever Hugues Renson. Stanislas Guerini a demandé à Barbara Pompili si sa démarche est « sécessionniste ». Il a été rassuré par sa réponse et ils ont convenu de se revoir.

Avant ce rendez-vous, les Marcheurs étaient troublés par le nom du parti En Commun, suspecté d’être un pont vers « Paris en commun », le mouvement d’Anne Hidalgo, dont Hugues Renson est un ami proche. « Demande-t-on à Gérald Darmanin s’il soutiendra Xavier Bertrand ? », rétorque-t-on à En Commun pour évacuer la question.

Pour l’heure, le parti pompiliste s’imagine aux côtés d’Emmanuel Macron en 2022. « Nous ne sommes pas des frondeurs », insiste Cécile Rilhac. Mais Hugues Renson prévient : « En 2022, l’enjeu ne peut pas être la question identitaire, mais plutôt le projet collectif pour réparer le pays et réussir notre convalescence » post Covid-19. En attendant, il y aura les régionales et la périlleuse question des alliances de second tour. Pour ce nouveau mouvement, un accord avec la droite est une ligne rouge à ne pas franchir.

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